Scène évocatrice des défis humanitaires à Gaza en 2025


Conflit à Gaza: Craintes de Famine et Impacts Humanitaires


Conflit à Gaza: Craintes de Famine et Impacts Humanitaires

La bande de Gaza traverse actuellement l’une des pires crises humanitaires de son histoire. Selon les dernières évaluations du Programme alimentaire mondial (PAM), l’ensemble des 2,2 millions d’habitants de l’enclave palestinienne sont confrontés à une insécurité alimentaire aiguë, dont plus de 500 000 personnes qui souffrent déjà de conditions proches de la famine.

Les experts de l’ONU ont formellement identifié des « conditions de famine » dans le nord de Gaza dès mars 2024, une situation qui s’est depuis étendue à d’autres zones du territoire. Le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), référence mondiale en matière d’évaluation des crises alimentaires, a placé Gaza au niveau d’alerte maximal.

« Ce que nous observons à Gaza est sans précédent dans l’histoire récente », a déclaré Martin Griffiths, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires de l’ONU. « La rapidité avec laquelle la famine s’est installée témoigne de l’intensité du conflit et de l’effondrement des infrastructures essentielles. »

Les causes d’une catastrophe annoncée

La crise alimentaire actuelle résulte d’une combinaison de facteurs aggravants. Le blocus imposé par Israël depuis le début des hostilités en octobre 2023 a drastiquement limité l’entrée de biens essentiels. Selon OCHA (Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies), moins de 20% des camions d’aide nécessaires parviennent quotidiennement à entrer dans l’enclave.

Les infrastructures vitales de Gaza ont été largement détruites : 70% des installations médicales sont hors service, 95% de la population n’a pas accès à l’eau potable, et la quasi-totalité des boulangeries et marchés alimentaires ont cessé de fonctionner. Les destructions massives des terres agricoles et des installations de pêche ont anéanti les capacités locales de production alimentaire.

Le Dr Adnan Al-Bursh, médecin à l’hôpital Al-Shifa de Gaza, témoigne : « Nous voyons désormais des enfants souffrant de malnutrition sévère, avec des symptômes que nous n’avions jamais observés auparavant dans notre pratique médicale à Gaza. Les cas de marasme et de kwashiorkor se multiplient. »

Des conséquences sanitaires alarmantes

Les effets de cette crise alimentaire sur la santé publique sont dévastateurs. L’UNICEF rapporte que plus de 90% des enfants de moins de cinq ans souffrent de carences nutritionnelles sévères. Les taux de malnutrition aiguë ont dépassé les 15%, bien au-delà du seuil d’urgence de 10% établi par l’Organisation mondiale de la Santé.

Les médecins sur place signalent une augmentation dramatique des maladies liées à la malnutrition et au manque d’hygiène : diarrhées aiguës, infections respiratoires et maladies cutanées. La situation est particulièrement critique pour les 50 000 femmes enceintes ou allaitantes qui nécessitent une nutrition renforcée.

« La malnutrition chronique aura des conséquences irréversibles sur le développement physique et cognitif d’une génération entière d’enfants gazaouis », alerte le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS.

Les obstacles à l’aide humanitaire

Malgré les efforts des organisations internationales, l’acheminement de l’aide humanitaire reste extrêmement problématique. Les points de passage frontaliers fonctionnent de manière intermittente, et les convois humanitaires font face à des délais d’inspection prolongés.

Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a documenté plus de 150 incidents où des convois humanitaires ont été retardés ou refusés aux points de contrôle depuis janvier 2024. Les zones du nord de Gaza sont particulièrement isolées, certains secteurs n’ayant reçu aucune aide substantielle depuis plusieurs mois.

Philippe Lazzarini, Commissaire général de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine), a déclaré : « Nous sommes confrontés à une situation où l’aide existe, les donateurs ont financé les opérations, mais nous ne pouvons pas atteindre ceux qui en ont désespérément besoin. C’est une tragédie évitable qui se déroule sous nos yeux. »

L’impact psychologique et social

Au-delà de la faim physique, la crise alimentaire engendre des traumatismes psychologiques profonds. Les familles sont contraintes à des choix impossibles, comme rationner la nourriture entre leurs enfants. Les travailleurs humanitaires rapportent une augmentation des cas de détresse psychologique sévère, particulièrement chez les enfants.

« Quand un parent ne peut plus nourrir son enfant, cela détruit quelque chose de fondamental dans la relation parent-enfant et dans l’estime de soi », explique Iman Jibril, psychologue palestinienne travaillant avec Médecins Sans Frontières.

La cohésion sociale est également mise à l’épreuve. Des incidents de pillage de convois humanitaires ont été signalés, reflétant le désespoir croissant de la population. Les mécanismes traditionnels de solidarité communautaire, qui ont longtemps permis aux Gazaouis de faire face aux crises, s’effondrent sous la pression d’une pénurie généralisée.

Les réponses internationales et leurs limites

Face à cette catastrophe, la mobilisation internationale reste insuffisante. La Cour internationale de Justice a ordonné à Israël en janvier 2024 de prendre des mesures immédiates pour permettre l’acheminement de l’aide humanitaire, mais l’application de cette décision reste limitée.

Les conférences de donateurs ont permis de récolter plusieurs milliards de dollars pour l’aide à Gaza, mais les organisations humanitaires soulignent que l’argent seul ne résout pas le problème d’accès. Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté plusieurs résolutions appelant à faciliter l’aide humanitaire, sans impact significatif sur le terrain.

« Nous avons les ressources, nous avons l’expertise, mais nous n’avons pas l’accès », résume David Beasley, directeur exécutif du Programme alimentaire mondial. « Sans un accès humanitaire sûr et durable, aucune amélioration significative n’est possible. »

Perspectives et solutions urgentes

Pour éviter une catastrophe humanitaire encore plus grave, plusieurs mesures sont considérées comme essentielles par les experts :

  • L’ouverture permanente et sans restriction de tous les points de passage vers Gaza, permettant un flux continu d’aide humanitaire.
  • La mise en place de « pauses humanitaires » régulières dans les hostilités pour faciliter la distribution de l’aide et les évacuations médicales.
  • Le rétablissement des services essentiels, notamment l’électricité et l’eau potable, indispensables au fonctionnement des installations médicales et sanitaires.
  • L’augmentation significative de l’aide alimentaire d’urgence, incluant des suppléments nutritionnels spécialisés pour les enfants et les femmes enceintes.
  • La protection du personnel humanitaire, dont 196 membres de l’UNRWA ont déjà perdu la vie depuis le début du conflit.

La crise alimentaire à Gaza représente un échec collectif de protection des populations civiles en temps de conflit. Au-delà des considérations politiques et militaires, l’urgence humanitaire exige une réponse immédiate et coordonnée de la communauté internationale.

Les conséquences de cette famine dépasseront largement le cadre temporel du conflit actuel. Les séquelles physiques et psychologiques marqueront une génération entière, compromettant les perspectives de paix et de développement à long terme dans la région.

Comme l’a souligné António Guterres, Secrétaire général des Nations Unies : « La famine à Gaza n’est pas simplement une catastrophe humanitaire, c’est une tache sur notre conscience collective. Chaque jour qui passe sans action décisive est un jour où nous échouons à protéger les plus vulnérables. »

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